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5 mois en stage de recherche à Harvard pour Laura
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Étudiante à l’ISAE-SUPAERO dans le parcours recherche du Département Aérodynamique, Énergétique et Propulsion (DAEP), Laura CHOQUET a progressivement orienté son cursus vers l’intelligence artificielle appliquée à la mécanique des fluides. Pour son stage, elle a pu vivre une expérience à l’international, en se rendant à Boston pendant 5 mois.
Elle vous partage son expérience !

Pourquoi l’université d’Harvard et les États-Unis ?
Étudiante à l’ISAE-SUPAERO dans le parcours recherche du département Aérodynamique, Énergétique et Propulsion (DAEP), j’ai progressivement orienté mon cursus vers l’intelligence artificielle appliquée à la mécanique des fluides. Pendant mon année de césure, j’ai suivi le Master Maths, Vision et Apprentissage (MVA) de l’ENS Paris-Saclay, une formation d’excellence en intelligence artificielle qui met un fort accent sur l’initiation à la recherche. Ce choix s’inscrivait parfaitement dans mon projet académique et m’a donné l’élan pour chercher une expérience de recherche à l’étranger, afin de valider à la fois le master et ma mobilité académique requise pour mon diplôme d’ingénieur.
C’est dans ce contexte que Michaël Bauerheim, professeur du DAEP et enseignant à l’ISAE-SUPAERO, a contacté Petros Koumoutsakos, professeur très réputé d’Harvard, pionnier dans l’utilisation de l’intelligence artificielle pour les simulations en mécanique des fluides. Ce qui n’était au départ qu’un simple mail envoyé sans grande attente s’est transformé en une véritable opportunité de stage.
Être immergée pendant cinq mois dans un laboratoire d’Harvard, au contact d’une équipe internationale de chercheurs, représentait pour moi une expérience inouïe. Je voulais découvrir la réalité de la recherche dans un tel environnement : comprendre la dynamique interne d’un grand labo, voir comment s’articulent les collaborations, et surtout échanger avec des chercheurs experts dans leur domaine.
J’étais aussi très curieuse de découvrir les États-Unis et de voir comment j’allais me débrouiller en partant complètement seule, dans une ville que je ne connaissais pas du tout, pour une durée de cinq mois sans rentrer voir ma famille. C’était pour moi un vrai challenge personnel : je voulais tester ma capacité d’adaptation, voir comment je réagirais face à l’inconnu, et surtout je voulais sortir de ma zone de confort.

Que retiens-tu de ton séjour et de ton immersion ?
Laura CHOQUET

Mon séjour à Boston a été extrêmement enrichissant, il représente pour moi une véritable parenthèse dans mon parcours. J’y ai beaucoup appris, autant sur le plan académique que personnel et linguistique.
Avant de partir, j’avais quelques interrogations sur le niveau attendu d’un stagiaire à Harvard, et sur l’intensité du travail demandé. Pour maximiser mon immersion, j’ai choisi de partir sur toute la durée disponible : je suis montée dans l’avion deux jours après la fin de mon année au MVA, et je suis rentrée seulement trois jours avant ma reprise de cours à l’ISAE-SUPAERO. Cette régularité et cet engagement m’ont permis de bien avancer sur mon projet et de laisser une très bonne impression à mes encadrants. Je pense sincèrement que d’autres élèves de l’ISAE-SUPAERO pourraient profiter, comme moi, de ce type de stage dans ce laboratoire.
Sur place, mes collègues ont été tout de suite très accessibles et chaleureux. On se fait souvent une image un peu intimidante des chercheurs dans une université prestigieuse comme Harvard, mais en les côtoyant au quotidien, j’ai vite réalisé qu’ils partageaient aussi les doutes, les incertitudes et parfois les difficultés dans leur travail de recherche. En revanche, le fonctionnement du laboratoire était très différent de ce que j’avais connu au DAEP : une hiérarchie plus pyramidale, une pression plus forte liée aux financements, et une attente claire en matière de résultats.
Dès mon arrivée, tous les membres du groupe m’ont présenté leurs travaux, répondant avec une grande précision à mes questions. Leurs recherches portaient sur l’utilisation d’algorithmes d’intelligence artificielle pour accélérer les simulations de mécanique des fluides, à petite ou grande échelle, notamment à travers l’utilisation du Reinforcement Learning, des modèles de diffusion ou des Transformers.
Mon encadrant sur place, Lucas Amoudruz, avait développé, au cours de sa thèse avec son laboratoire, un logiciel de calcul dédié aux interactions micro-fluidiques. Cet outil permettait de modéliser avec une grande précision le comportement des globules rouges à très petite échelle, ainsi que leurs interactions avec des micro-robots évoluant dans des réseaux capillaires. Cela offrait un cadre réaliste pour explorer des applications biomédicales, et mon projet de recherche s’inscrivait dans cette perspective : améliorer le transport ciblé de médicaments dans le corps humain.
Plus précisément, j’ai travaillé sur l’utilisation de l’apprentissage par renforcement pour optimiser le contrôle de micro-nageurs, c’est-à-dire de minuscules dispositifs capables de se déplacer dans les vaisseaux sanguins en étant propulsés par un champ magnétique tournant. Ces micro-robots représentent une voie prometteuse pour délivrer un traitement directement à l’endroit souhaité, en franchissant les barrières physiques qu’aucune autre technique traditionnelle ne permet d’atteindre. L’enjeu de mon stage consistait à leur apprendre à suivre des trajectoires complexes dans un environnement fortement perturbé, en intégrant les effets du flux sanguin et des interactions avec les cellules environnantes.
Grâce à l’aide de Lucas qui avait construit un sujet de stage à la fois challengeant et bien pensé, je me suis sentie pleinement investie dans le projet de recherche. J’ai pu développer des compétences techniques solides mais aussi des capacités d’organisation importantes dans un environnement de recherche. Lucas m’a laissé une grande liberté pour explorer mes idées, tout en étant disponible pour répondre à mes questions lorsque c’était nécessaire.
Cette autonomie m’a appris à persévérer, notamment lors d’une période où mon code ne fonctionnait pas pendant plusieurs semaines. Plutôt que de baisser les bras, j’ai essayé d’investiguer méthodiquement, de comprendre d’où venait l’erreur, et j’ai découvert à quel point ce processus faisait partie intégrante du travail de chercheur. J’ai aussi réalisé qu’il était tout aussi important d’aller loin dans les détails techniques que de savoir prendre du recul, de replacer nos résultats dans une vision plus globale et de questionner la pertinence de nos approches après plusieurs semaines de travail.
Qu’est-ce qui t’a marqué sur le plan personnel ?
Boston est une ville étudiante : entre Harvard et le MIT, elle attire une communauté internationale très diverse. J’y ai rencontré de nombreux étudiants en stage comme moi, mais aussi des doctorants et post-doctorants venus d’Europe, d’Asie et d’Amérique latine. Leurs témoignages sur leur parcours académique et leurs choix de carrière m’ont beaucoup aidée à réfléchir à mon propre avenir. Même si je ne suis pas encore complètement décidée, ces échanges ont conforté mon idée de réaliser ma thèse en Europe.
J’ai fait l’effort d’aller vers les autres, de poser des questions sur leurs parcours, leurs doutes et leur vision du système académique. Ces discussions m’ont ouvert les yeux sur des trajectoires très variées, parfois éloignées de la mienne. J’étais aussi heureuse de rencontrer des personnes qui n’étaient pas passées par le schéma « classe préparatoire et école d’ingénieurs » que je connaissais si bien : cela m’a donné un autre regard sur les différentes manières d’arriver à la recherche.
Je me suis assez vite adaptée à la vie américaine, au dynamisme de la ville et à son rythme. Mais à la fin de mon séjour, je sentais que je n’étais pas totalement à ma place. Par contraste, ce voyage m’a fait aimer encore davantage la France, ses villes et sa culture. Vivre à l’étranger apporte une vraie ouverture d’esprit : on apprend à se détacher de ses habitudes, à voir les choses autrement, et surtout à relativiser ce que l’on croyait évident.
Et sur le plan linguistique ?
Travailler dans un environnement international m’a énormément fait progresser en anglais. Mes collègues venaient des quatre coins du monde, avec des accents parfois très différents, et cela m’a obligée à m’adapter rapidement. Aujourd’hui, je me sens beaucoup plus à l’aise pour m’exprimer à l’oral et je comprends mieux l’anglais qu’avant. Vivre en colocation avec des étudiants de différentes nationalités, dont une Américaine, a aussi été une expérience humaine très riche. J’ai aimé écouter leurs parcours, souvent inspirants, et partager au quotidien des moments de vie simples mais agréables.
Quels sont les temps forts gravés dans ta mémoire ?
Les moments marquants ont été nombreux : mes voyages sur la côte Est, avec la démesure de New York et l’extravagance de Miami. J’ai aussi été à l’initiative de la participation de mon laboratoire à un tournoi de beach-volley inter-labos d’Harvard, une expérience conviviale qui a permis de renforcer les liens au sein de l’équipe dans un cadre complètement différent. Enfin, un temps fort marquant a été lorsque le directeur de mon labo a estimé que mon travail mériterait une publication dans un journal scientifique : ce fut une vraie reconnaissance de la valeur de mon travail.
Que t’a apporté ce séjour et quelles perspectives pour l’avenir ?
Ce stage a consolidé mon envie de rester proche de la recherche, que ce soit en entreprise ou dans le milieu académique. Je m’oriente naturellement vers une thèse, mais je souhaite aussi découvrir l’univers R&D en entreprise avant de prendre une décision définitive. Cette expérience m’a permis d’élargir mon réseau académique, de travailler avec des chercheurs reconnus internationalement et de bénéficier du soutien d’un directeur de laboratoire particulièrement influent, dont l’appui pourra être déterminant pour mes futures démarches.
Les retours de mes encadrants sur mon travail ont été très positifs, ce qui, je l’espère, ouvrira la voie à d’autres étudiants de l’ISAE-SUPAERO intéressés par une expérience de recherche à Harvard. Au-delà de l’expérience personnelle, je crois que ce type de stage contribue à renforcer les liens entre l’ISAE-SUPAERO et des laboratoires de recherche de tout premier plan, ce qui est bénéfique pour l’école comme pour ses étudiants.
Ce voyage m’a donné encore plus envie de repartir en immersion, de découvrir davantage l’Europe, et il m’a aussi rendue beaucoup plus confiante à l’idée de travailler à nouveau à l’étranger.
Un dernier mot pour nos donateurs ?
Je voudrais remercier sincèrement les donateurs de la Fondation ISAE-SUPAERO pour le soutien qu’ils apportent aux étudiants. Grâce à eux, il est possible de vivre des expériences hors du commun, qui marquent profondément et laissent une empreinte indélébile dans le développement personnel et académique d’un jeune adulte.