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6 mois à Tokyo pour Raphaël

Publié le

30 Avr 2025

Raphaël a été soutenu par la Fondation pour réaliser une substitution de 6 mois à l’Université de Tokyo au Japon afin de valider son diplôme et de concrétiser un rêve de longue date essentiel pour son développement académique et professionnel.

Il vous raconte cette expérience transformatrice au cœur d’une culture fascinante, entre traditions et innovations.

Mon séjour à l’Université de Tokyo a été une expérience extrêmement enrichissante tant sur le plan académique que culturel. Le but de ce séjour était de compléter mon parcours académique dans le domaine de l’aéronautique et de l’espace, tout en explorant une culture qui m’a toujours fasciné : celle du Japon. Pour être accepté dans cette prestigieuse institution, il m’a été demandé de trouver un laboratoire de recherche pour m’y intégrer, ce qui a marqué le début de mon aventure à Tokyo.

Comment as-tu intégré le laboratoire Aircraft Design ?

Raphaël Tinebra

Après avoir passé un entretien avec le département d’aéronautique et de l’espace, j’ai été accepté dans le laboratoire Aircraft Design. Une fois arrivé au Japon, l’une des premières étapes de mon immersion a été la rencontre avec mon « sensei », mon professeur principal, le premier jour au Japon. Ce fut un moment marquant, car dans la culture japonaise, cette rencontre n’est pas seulement académique, mais elle symbolise aussi un début de relation mentor-élève très respectée. Chaque laboratoire au sein de l’Université de Tokyo possède ses propres locaux, son « sensei » et ses étudiants attitrés, créant ainsi un environnement de travail très spécifique et structuré.

J’ai été agréablement surpris par l’intensité de la recherche menée dans ce laboratoire. Le Japon est un leader mondial dans les technologies aéronautiques et aérospatiales, et l’environnement de travail dans lequel j’ai évolué était à la hauteur de cette réputation. La culture du travail au Japon est fascinante, mais elle est également extrêmement exigeante. Il est important de noter que malgré la hiérarchie très marquée, l’atmosphère dans mon laboratoire était très conviviale. En effet, plusieurs événements sociaux sont organisés pour renforcer les liens entre les membres du laboratoire. Par exemple, lors de la fête de bienvenue et de la « Kōenkai » (懇親会), une rencontre conviviale, nous avons pu échanger de manière informelle, discuter de nos projets et partager des moments agréables, en dehors du cadre académique strict.

Quel bilan tires-tu de ce séjour sur le plan académique ?

L’expérience scolaire ne se limite pas à la recherche au sein du laboratoire. En effet, en tant qu’étudiant à l’Université de Tokyo, j’ai eu l’opportunité de suivre des cours dans divers départements afin d’élargir mes compétences. Un des points forts du système résidait dans le fait qu’en plus des cours spécialisés en aéronautique, j’avais la possibilité de suivre des enseignements dans d’autres départements d’ingénierie. Cela m’a permis d’explorer une variété de sujets, élargissant ainsi mes compétences et multipliant les facettes de mon métier d’ingénieur. Cela m’a poussé à sortir de ma zone de confort et à sélectionner des cours dans des départements voisins.

Parmi les cours que j’ai suivis, celui sur la propriété intellectuelle m’a particulièrement intéressé. Ce cours a abordé des aspects importants tels que les dépôts de brevets et les copyrights, des sujets essentiels pour mon futur métier d’ingénieur. J’en ai également profité pour poursuivre l’apprentissage du japonais, que j’avais commencé à l’ISAE-SUPAERO. Mais cette fois-ci de manière intensive, en triplant le nombre d’heures par semaine, non pas pour en faire un simple passe-temps, mais bien un bagage qui pourrait m’être utile professionnellement selon mes choix de carrière. S’ajoutant à cela le besoin vital de déchiffrer les kanji dans la rue et les restaurants, j’ai acquis au fil des mois un véritable niveau en japonais. Bien que cela n’ait pas été sans difficulté, j’étais finalement capable de tenir une conversation élémentaire avec un Japonais (ce qui m’a sauvé plus d’une fois dans la campagne japonaise). J’ai également pu développer mes compétences dans des domaines connexes tels que la physique des matériaux et l’énergie, qui s’alignent parfaitement avec ma spécialisation pour mon domaine d’études de dernière année. Cette diversité des matières a grandement contribué à enrichir mes connaissances et ma vision de mon futur professionnel. En effet, j’ai trouvé ces cours tout à fait complémentaires à ceux de l’ISAE-SUPAERO: tandis que ces derniers étaient très théoriques, ceux que j’ai suivis à l’Université de Tokyo étaient plus appliqués. Ils couvraient non seulement l’état de l’art des énergies renouvelables et leur fonctionnement physique, mais aussi leur histoire, leur rôle dans la société, les chaînes d’approvisionnement en matériaux, les procédés de production, ainsi que les dynamiques du marché et de la réglementation. Je pense que ce sont des connaissances essentielles pour un futur ingénieur qui, je l’espère, prendra des décisions allant au-delà des seuls aspects techniques. Bien entendu, tous les cours étaient dispensés en anglais, ce qui correspondait parfaitement à l’un de mes objectifs principaux lors de cet échange : perfectionner mon niveau d’anglais. En effet, maîtriser cette langue était essentiel pour me donner la possibilité de travailler à l’international. Or un des points forts de l’enseignement à TODAI (Université de Tokyo) était son orientation marquée vers les travaux de groupe, où l’échange et l’argumentation occupaient une place centrale. Ainsi, j’ai non seulement consolidé mes connaissances théoriques en anglais, mais j’ai également développé des compétences en communication, en échange d’idées et en rhétorique dans cette langue.

En ce qui concerne la suite de mon parcours, je n’exclus pas la possibilité de retourner travailler au Japon. J’ai pu maintenir plusieurs contacts et découvrir des carrières inspirantes qui pourraient me correspondre. J’ai notamment rencontré à plusieurs reprises des ingénieurs en mission temporaire au Japon. Par exemple, j’ai échangé avec un ingénieur travaillant pour Toyota en France, mais en mission de deux ans à Osaka. Ce type de parcours me semble être un excellent compromis pour retourner au Japon. D’autant plus que j’ai pu constater à quel point ce pays est à la pointe de la technologie dans des domaines qui me passionnent, comme l’aérodynamique des avions, mais aussi celle des trains (ce n’est pas un hasard si c’est le pays du « bullet train »). Les opportunités professionnelles y sont nombreuses et alignées avec mes aspirations.

Et sur le plan culturel ?

J’ai vécu ce semestre à Tokyo comme le voyage d’une vie et ai saisi chaque opportunité pour découvrir au maximum la culture japonaise et explorer le pays. Aujourd’hui, le Japon est l’une des destinations les plus en vogue, et je dois dire que tout le bien qu’on en dit est mérité. Je n’ai jamais été déçu : chaque ruelle réserve une surprise, chaque petite boutique ou restaurant est un plaisir à découvrir. J’avais quelques craintes concernant le surtourisme, mais je l’ai finalement très peu ressenti. Les touristes se concentrent principalement autour des sites les plus célèbres, et dès que l’on s’éloigne des sentiers battus, la magie opère. Je ne compte plus le nombre de fois où, en me promenant au hasard, je suis tombé sur un temple splendide, me donnant l’impression d’être seul au monde. Bien sûr, Tokyo fut ma ville de coeur. L’image que l’on en a – une métropole futuriste aux gratte-ciel vertigineux et aux rues grouillantes de monde – ne représente pourtant qu’une facette de cette ville aux mille visages. Chaque quartier possède sa propre identité, et c’est ce qui rend Tokyo si fascinante.

Je vivais à Bunkyō, un quartier paisible parsemé de maisons familiales et de ruelles si étroites qu’on ne pouvait les traverser qu’au volant des célèbres petites voitures cubiques japonaises. Mon université, elle, se trouvait à la frontière de Nezu, un quartier populaire où l’on trouve tout le nécessaire dans de petites boutiques artisanales au charme d’un autre temps. C’est aussi à Nezu que j’ai découvert certains des meilleurs restaurants de la ville : des établissements minuscules, parfois plus petits qu’une chambre à coucher, où un chef, souvent une personne âgée, préparait derrière un comptoir quelques plats façon izakaya. À peine une poignée de chaises, et, il me semble, les mêmes habitués qui s’y retrouvaient chaque soir (peut-être en étais-je un à la fin..).

Nezu fait en réalité partie d’Ueno, l’un des joyaux culturels de Tokyo. Avec ses nombreux musées et son vaste parc (Ueno-kōen), c’est un quartier où l’on pourrait passer des journées entières à flâner. On y trouve des temples et des sanctuaires nichés entre les allées, un zoo, le plus grand musée du pays, ainsi que des cafés où l’on s’attarde volontiers. Non loin de là, sous les rails de la gare, s’étend Ameya-Yokochō, un marché effervescent où se mêlent échoppes de street food, izakaya animés et petites solderies aux prix imbattables.

Je pourrais parler des heures des mille et une particularités de Tokyo, mais le reste du Japon vaut bien sûr tout autant le détour. Le patrimoine de Kyōto est inégalé, les temples de Nikkō d’une beauté saisissante, les onsen de Hakone une expérience hors du temps, et les paysages de Sendai tout simplement inoubliables…

Au-delà des visites et découvertes, vivre au Japon fut une véritable révélation pour moi. À travers mon apprentissage académique et mes voyages, ces expériences m’ont permis de découvrir un pays unique, aux valeurs profondément enracinées. Le Japon est l’un des pays les plus sûrs au monde, et cela se ressent immédiatement. Ce qui crée un environnement où l’on peut se promener à toute heure du jour ou de la nuit, en toute tranquillité. Cela apporte une sérénité que l’on ne trouve pas facilement ailleurs.

Les rues japonaises sont remarquablement propres et bien entretenues, preuve d’un respect profond pour l’ordre et la propreté. J’ai été frappé de voir à quel point les Japonais sont méticuleux et assidus dans leur quotidien. Par exemple, il m’est arrivé de voir des personnes aspirer les rues, une pratique que je n’avais jamais observée en France. Ce respect pour l’environnement est également visible dans les transports publics, où la ponctualité et l’efficacité sont primordiales. Le réseau de transport japonais, notamment les trains, les métros et les bus, est d’une efficacité redoutable. J’ai pris un grand plaisir à me rendre à l’Université, même pendant les heures de pointe. Contrairement à ce que l’on peut observer dans d’autres grandes villes, les Japonais sont très organisés et respectent strictement l’ordre. Il est d’ailleurs courant de voir les gens faire la queue, attendre patiemment leur tour, sans jamais bousculer les autres. Ce système fonctionne à merveille, et on ne ressent jamais d’inconfort, même dans les trains bondés. On vit dans une mégapole, avec la sérénité de la campagne…

L’hospitalité, le respect et la politesse des Japonais sont également des aspects qui rendent toutes les interactions agréables. Leurs manières, leur courtoisie et leur bienveillance rendent l’expérience très plaisante. Après plusieurs mois passés au Japon, je me suis retrouvé à me poser des questions sur mon futur, notamment sur la possibilité de travailler dans ce pays. L’atmosphère calme et paisible du Japon m’a profondément marqué, et j’avoue qu’aujourd’hui, je me sens beaucoup moins attiré par la vie à Paris. L’ambiance pesante de certaines grandes villes françaises me semblent désormais bien éloignées de la réalité japonaise.

Sur le plan personnel, que retiens-tu de ce semestre ?

Au-delà des aspects académiques et pratiques, ce séjour à Tokyo m’a permis de rencontrer une multitude de personnes venant du monde entier. L’Université de Tokyo attire des étudiants de tous horizons, ce qui en fait un lieu idéal pour échanger et enrichir ses perspectives culturelles. J’ai pu discuter avec des étudiants d’Asie, d’Amérique, et d’Europe, et ces échanges m’ont ouvert les yeux sur de nombreuses choses. Cela m’a fait prendre conscience des différences culturelles et m’a amené à remettre en question certains principes que j’applique à moi-même et qui régissent mes propres choix de vie.

Bien entendu, Il y a des maux au Japon (dans leurs conditions de vie ou de travail) que nous n’envions certainement pas depuis nos pays occidentaux. Mais il est indéniable que les valeurs de respect, d’harmonie et de solidarité qui sont omniprésentes dans la société japonaise m’ont particulièrement touché. Cela crée une atmosphère de coopération et de bienveillance qui, je trouve, manque parfois dans nos sociétés occidentales. Ces différences culturelles m’ont fait réfléchir sur ma propre manière de vivre et sur les valeurs que j’attribue à ma vie personnelle et professionnelle.

Comment décrirais-tu l’impact global de cette expérience sur toi ?

Mon séjour à l’Université de Tokyo restera gravé dans ma mémoire comme une expérience transformatrice, tant sur le plan académique que personnel. Ce semestre a été bien plus qu’une simple immersion dans un système éducatif prestigieux ; il a été une plongée profonde dans une culture fascinante, riche en traditions mais aussi en innovations. Grâce à cette opportunité, j’ai pu approfondir mes connaissances tout en explorant des domaines connexes qui ont élargi ma vision et renforcé mes compétences techniques.

Vivre au Japon m’a également permis de découvrir un mode de vie unique, marqué par l’ordre, le respect, mais aussi une forme d’harmonie sociale. Ces valeurs, qui imprègnent chaque aspect de la vie quotidienne, m’ont inspiré et m’ont poussé à réfléchir à ma propre manière d’interagir avec le monde. Les rencontres avec des étudiants et des professionnels venus des quatre coins du globe ont enrichi ma perspective culturelle et m’ont ouvert de nouvelles voies pour mon avenir professionnel. Je suis convaincu que les compétences acquises et les liens tissés durant ce séjour seront des atouts majeurs pour mes projets futurs. Je recommande vivement à tout étudiant de saisir de telles opportunités, car même si ça peut être terrifiant d’aller dans l’inconnu : elles transforment notre vision du monde et nous préparent à relever les défis de demain avec une ouverture d’esprit et une détermination renouvelée.

Un mot de la fin ?

Merci infiniment pour cette chance inestimable.

Je souhaite vivement remercier les donateurs de la Fondation pour leur engagement et leur soutien indispensable. Leur contribution offre à des étudiants comme moi la chance de se former, de grandir et de s’épanouir dans un cadre international. J’ai perçu leur aide comme un tremplin vers des opportunités qui, sans eux, n’auraient probablement pas été à ma portée. 

Merci infiniment pour cette confiance et cette générosité qui font toute la différence.

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