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Projet SCALAR-6 : 10 ans de passion et une fusée bi-étagée entièrement conçue au SCube

Publié le

27 Oct 2025

Dix ans après le premier lancement du programme Supaéro CAnsat LAuncheR, les étudiants de la Supaéro Space Section (SCube) ont franchi une nouvelle étape majeure avec SCALAR-6, la première fusée bi-étagée expérimentale entièrement conçue et réalisée au sein du club. 

Ludovic BASTIEN, chef du projet SCALAR-V en 2024 puis SCALAR-6 en 2025 témoigne.

Temoignage-header-scalar-6-2025

Qu’est-ce que le projet SCALAR-6 ?

SCALAR-6 correspond à la sixième version du lanceur SCALAR (Supaéro CAnsat LAuncheR). Entièrement conçu et réalisé au sein du SCube (Supaéro Space Section), ce projet avait pour objectif d’atteindre le but technique ultime du programme : concevoir et faire voler une fusée expérimentale bi-étage active lors du C’Space 2025, emportant une expérience sous forme d’un CanSat éjecté à l’apogée de son vol. Une fusée bi-étage active est constituée de deux étages superposés, chacun équipé de son propre moteur, le second étant allumé en vol après la séparation. La réalisation de ce vol actif nécessite au préalable un vol dit passif, au cours duquel le deuxième étage emporte un moteur inerte servant de simulateur de masse.

Ce projet s’est inscrit dans la lignée des anciennes SCALAR, en particulier SCALAR-V, lanceur mono étage du C’Space 2024 dont le vol a été nominal le 10 juillet 2024 et a permis à SCALAR-6 d’exister. Le club avait ainsi pour objectif de regagner les compétences perdues à la suite de la crise du covid, et même d’aller plus loin, ce qui a été fait avec SCALAR-V et SCALAR-6.

Il ne faut pas cependant oublier l’historique du club et du projet SCALAR. En effet, le projet a fêté ses 10 ans avec le projet SCALAR-6 puisque la première SCALAR a été réalisée en 2015.

L’équipe de SCALAR-6 a impliqué une trentaine d’étudiants, majoritairement de deuxième année et de première année, formés au club. Ces étudiants étaient issus des filières ingénieur, ingénieur de spécialité en alternance ainsi que de mastères spécialisés. Comme l’indique le nom du projet, la fusée a embarqué une expérience sous forme de « minisatellite » de la taille d’une canette appelé CanSat. Celui-ci a été réalisé par des collégiens liés au programme OSE L’ISAE-SUPAERO, aidés par des étudiants du club.

Témoignage Fusée Scalar 6

Crédit Photo : CNES 2025 – Planet Sciences – C. Pouilly

Quels étaient les objectifs du projet et comment s’est-il déroulé ?

Le projet a entièrement été réalisé sur l’année scolaire 2024/2025. Nous avons fait le design de la fusée en début d’année puis la fabrication à la fin de l’hiver et au printemps 2026. Avant un départ pour la campagne de lancement, le C’Space, organisé par Planète Science et le CNES du 5 au 12 juillet 2025. L’unique vol de SCALAR-6 a eu lieu le mercredi 9 juillet 2025, à 17h52 heure de Paris.

Pour le CanSat, 2 séances de 3h ont été réalisées dans le cadre du projet OSE avec des collégiens. La première séance a eu lieu le 9 janvier et la seconde le 13 mars. Le CanSat a ensuite été fini et affiné dans les mois suivants par les membres de SCALAR en charge de cette partie du projet.

La Supaero Space Section était présente avec huit membres de SCALAR pour cette campagne de lancement. Cette édition a été marquée par une difficulté particulière : la pénurie de moteurs PRO75. Sur dix équipes présentes, seules cinq ont pu s’en procurer un. […] Face aux contraintes matérielles et au temps limité, nous avons dû revoir nos ambitions. En particulier, l’absence d’évents sur la peau carbone, puisque nous avons oublié cette contrainte, rendait impossible un vol actif. Nous avons rapidement décidé de concentrer nos efforts sur un vol passif, plus réaliste dans le contexte de la campagne. En parallèle, nous avons décidé d’abandonner plusieurs expériences secondaires (mesure GPS, télémétrie, fonctionnement du CanSat), car leur mise en place et leur validation auraient considérablement ralenti la qualification de la fusée. Aussi, les qualifications n’ont pas été sans difficultés. Tout d’abord, nous avons rencontré des problèmes de stabilité, n’ayant jamais réalisé de test avec la fusée entièrement assemblée, nous avons eu plusieurs mauvaises surprises lors des premiers essais. Sur l’étage supérieur, deux points critiques sont apparus. L’absence d’évents dans la peau carbone représentait un risque majeur, car en cas de défaillance moteur, une surpression aurait pu provoquer une explosion. De plus, le moteur était difficile à extraire, ce qui posait un problème de sécurité important : en cas de non-allumage, le pyrotechnicien doit pouvoir le retirer rapidement et sans danger. L’étage inférieur n’était pas exempt de défauts non plus : un jeu a été constaté au niveau de l’accroche du moteur, que nous avons dû corriger en urgence à l’aide d’une pièce métallique improvisée pour caler correctement le propulseur. Enfin, lors des vols simulés, une répétition générale évaluée par un membre du CNES et de planète science avant de nous autoriser à voler, d’autres difficultés sont apparues, en particulier sur le seuil de détection du décollage et sur les fenêtres temporelles programmées pour l’ouverture des parachutes. Heureusement, nous avons pu corriger ces problèmes et valider SCALAR-6 lors du deuxième vol simulé.

De ces expériences, nous retenons une leçon essentielle : réaliser en amont tous les tests critiques afin d’éviter les imprévus lors des contrôles officiels

Temoignage-SCALAR-6-lancement-C_SPACE-2025_CHARLES

Comment s’est déroulé le vol de SCALAR-6 ?

SCALAR-6 a finalement décollé le mercredi 9 juillet à 17h52. Le vol a été semi-nominal :

  • l’étage inférieur a fonctionné conformément aux prévisions.
  • le système de récupération de l’étage supérieur a échoué, probablement en raison d’une défaillance électronique ou d’un problème de câblage.

Un point particulièrement positif est le succès du système de séparation inter-étages. La séparation a été franche et parfaitement réalisée, ce qui constitue un critère essentiel pour un futur vol actif. Ce retour d’expérience confirme la fiabilité du système de séparation, mais met en évidence la nécessité de simplifier drastiquement l’électronique de l’étage supérieur, notamment en réduisant le nombre de câbles.

Du fait de la non-récupération de l’étage supérieur, nous n’avons que les données du premier étage, qui était moins instrumenté que le second.

Votre retour d’expérience sur ce projet ?

Nous n’avons pas entièrement atteint l’objectif fixé d’un vol à deux étages actifs, mais SCALAR-6 reste une très grande réussite pour le club. Tous les systèmes nécessaires à un tel vol ont été développés, conçus et testés au moins une fois, ce qui nous a permis d’acquérir une expérience et des compétences précieuses au cours de l’année. […]

Au-delà des succès et des échecs, nous retenons surtout l’ensemble des connaissances et compétences acquises par les membres de l’équipe, qu’elles soient techniques ou humaines. Du côté humain, il y a bien sûr le travail en groupe, mais aussi la gestion des imprévus, parfois dans des conditions stressantes, et la persévérance nécessaire pour atteindre nos objectifs. Sur le plan technique, l’enseignement le plus marquant reste la confrontation avec la réalité : ce type de projet rappelle rapidement que la pratique est bien plus complexe que ce que la théorie laisse imaginer sur le papier.

Cette édition de SCALAR en est une bonne illustration. Après avoir relevé de nombreux défis, corrigé une multitude de petits problèmes et réussi à qualifier la fusée à travers une batterie de tests, le deuxième étage n’a pas fonctionné le jour du vol. L’expression venue d’outre-Atlantique, « Space is hard », a alors pris tout son sens pour l’équipe, avec la brutalité de voir son projet partir en balistique malgré toutes les heures investies.

Quel est l’avenir du projet SCALAR ?

SCALAR-6 a marqué une étape importante pour le club. C’était le projet des dix ans de SCALAR. C’était aussi le premier vol d’une fusée bi-étagée entièrement conçue par des étudiants du club, même si le vol est resté passif.

Nous avons appris énormément sur le plan technique et humain. Nous avons réussi à qualifier une fusée bi-étagée passif et à démontrer le bon fonctionnement de la séparation inter-étages. Nous n’avons pas encore atteint le vol actif, mais la base est posée pour la prochaine SCALAR.

Le soutien financier de la Fondation a joué un rôle essentiel. Il a permis d’assurer la gestion du budget et d’éviter que les étudiants financent le projet de leur poche.

Avec SCALAR-6, nous avons posé les jalons du futur. Le projet montre que le club est capable d’aller plus loin. Le prochain objectif sera naturellement un vol actif. Le club repart pour une nouvelle édition SCALAR : SCALAR-7. Nous comptons bien atteindre l’objectif d’une fusée bi-étage active.

Avez-vous un message pour les donateurs de la Fondation ? 

Le soutien de la Fondation a joué un rôle essentiel pour la gestion de la trésorerie. En mettant à disposition des moyens financiers immédiatement mobilisables et sans justificatifs, elle a évité aux membres d’avoir à avancer des frais. Ces fonds ont ainsi servi de véritable « budget de roulement », en attendant les remboursements de l’Association des Élèves via le compte de la Supaero Space Section, procédures plus longues et soumises à justificatifs. Certains achats n’étant pas pris en charge par l’AE (comme les trajets vers Tarbes ou certains achats en magasin sans facture), le recours à la Fondation a permis d’éviter toute dépense personnelle. Contrairement à l’édition précédente, SCALAR-V, où des frais avaient dû être assumés individuellement (achats de dernière minute ou transport pour la campagne), aucun membre n’a eu à payer de sa poche cette année.

L’équipe de SCALAR remercie chaleureusement l’ensemble des donateurs de la Fondation. Grâce à votre soutien, nous avons pu réaliser ce projet ambitieux, et nous vous en sommes profondément reconnaissants.

 

Je veux soutenir des projets comme celui de Ludovic et le projet SCALAR.