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6 mois au Jet Propulsion Laboratory pour Charles
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Actuellement en dernière année du cursus ingénieur à l’ISAE-SUPAERO, Charles MILLANCOURT a été soutenu par la Fondation pour réaliser une césure de 6 mois au Jet Propulsion Laboratory à Caltech en Californie, USA. L’occasion pour lui de faire un pas de plus vers son objectif professionnel : travailler dans le domaine de l’exploration spatiale, avec des rovers et/ou drones pour la science et le progrès technique.
Il fait le bilan de son expérience.
Pourquoi avoir choisi de partir au JPL ?
Mes motivations pour entrer au JPL étaient multiples. Le Jet Propulsion Laboratory (JPL) est un centre de recherche et développement de la NASA, spécialisé dans l’exploration robotique du système solaire. Cette expérience m’a permis de me plonger dans un environnement de recherche et d’ingénierie, notamment en robotique de renommée mondiale. J’ai confirmé mon désir de continuer ma carrière dans le domaine de l’exploration spatiale, avec des rovers et/ou drones pour la science et le progrès technique.
Pendant cette période de six mois, j’ai exploré des projets captivants liés à la vision par ordinateur et à la robotique, où j’ai pu développer mes compétences en ingénierie logicielle, et en traitement d’images. En effet la vision par ordinateur est un outil très précieux pour l’exploration spatiale : léger, moins cher et tout aussi performant que des capteurs encombrants. L’effet concret de ces projets sur les missions spatiales à venir m’a inspiré, tout comme la collaboration avec des experts de renommée mondiale dans un environnement aussi stimulant.
Grâce à ce stage, j’ai pu améliorer mes compétences techniques et linguistiques, ce qui me motive encore davantage à travailler dans un environnement international, dans une agence spatiale par exemple. Je souhaite apporter une plus grande contribution aux projets novateurs qui y sont élaborés, notamment dans les domaines de la robotique autonome et de la vision par ordinateur pour l’exploration spatiale : observation de la Terre, étude des lunes de Jupiter/Saturne et pour l’exploration de la planète Mars. En clair, je voulais voir de l’intérieur comment les ingénieurs travaillaient sur les plus grandes missions d’exploration spatiale et contribuer à celles-ci.
Raconte-nous comment s’est passé ton séjour ?
Charles Millancourt
J’ai vécu une expérience incroyable au JPL.
- D’un point de vue académique, j’ai eu la chance exceptionnelle de collaborer avec une équipe de recherche et d’ingénierie de haut niveau sur des projets en robotique et en vision par ordinateur, deux domaines essentiels pour l’exploration. L’équipe dans laquelle j’étais était l’Aerial Mobility Group de la NASA, qui a travaillé au préalable sur la mission de démonstartion Ingenuity sur Mars : un hélicoptère emmené sur Mars par le rover Perseverance et qui a fait 72 vols. C’était impressionnant de se retrouver avec ces personnes et travailler avec eux. Cette expérience dans un contexte aussi technique et exigeant m’a donné l’opportunité de mettre en pratique les compétences que j’ai acquises à l’ISAE-SUPAERO et lors de mes projets personnels pour approfondir ma connaissance des technologies de pointe que j’étudie. Le travail était technique et parfois difficile. Cela alliait à la fois le “software” (code et algorithmes) et “l’hardware” (un vrai drone sur lequel on faisait nos tests).
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Sur le plan culturel, la vie à Los Angeles a été intense. Comparé à Toulouse, j’ai été confronté à une ville au rythme très soutenu et d’une taille gigantesque. Il a été nécessaire de s’ajuster à un nouveau mode de vie, avec des habitudes différentes, une langue parlée au quotidien et une culture de travail différente de celle de la France. J’ai aimé la façon dont la hiérarchie était un peu effacée, et où la discussion se fait beaucoup plus facilement entre le chef de projet, le chef d’équipe et les stagiaires par exemple. Cette rupture culturelle a été très enrichissante : elle m’a donné une grande capacité d’adaptation, une ouverture d’esprit renforcée et une meilleure compréhension des modes de vie et de travail américains. Personnellement, je me suis beaucoup épanoui durant cette demi-année aux États-Unis. J’ai découvert des cultures différentes et me suis fait des amis venant du monde entier. Ce type d’expérience permet d’avoir une vision plus large et de changer son point de vue sur le monde du travail et de la vie personnelle.
C’est avec certitude maintenant que j’aimerais travailler dans un milieu enrichissant comme une agence spatiale, en travaillant avec des personnes de toutes nationalités sur des missions d’envergure mondiale. Il s’agit indéniablement d’un moment crucial dans ma vie personnelle et professionnelle, qui a non seulement confirmé mes aspirations, mais a également influencé ma vision à long terme de ma carrière et de mon avenir.
Quels ont été les temps forts de ton séjour ?
J’ai vécu de nombreux moments marquants pendant mon séjour au JPL, tant sur le plan professionnel que personnel. Collaborer avec des équipes de haut niveau sur une mission d’exploration de la planète rouge a été bien sûr l’expérience la plus intense de mon séjour : discuter, travailler et collaborer avec une telle équipe m’a fait grandir et m’a permis de découvrir d’autres méthodes de travail, à l’américaine. J’ai eu la chance de travailler sur une mission importante tant au niveau scientifique que technique. Il s’agit de l’algorithme de navigation du futur hélicoptère martien, un héxacoptère, pouvant parcourir des dizaines de km à des altitudes impressionnantes de plusieurs centaines de mètres. Ces conditions difficiles font que le travail d’élaboration des algorithmes était complexe et très intéressant. J’ai beaucoup appris grâce à mes collègues sur les solutions techniques employées pour ce genre de missions. Les discussions avec eux, en particulier lors des revues techniques et des échanges sur les possibilités d’innovation, ont été très enrichissantes. Mon stage a été divisé en trois parties : d’abord la compréhension du sujet, des enjeux et la prise en main des outils déjà développés, puis la partie implémentation du code pour l’outil de navigation, et enfin les tests sur le drone en intérieur et extérieur. Les tests ont été un moment important pendant mon séjour, cette campagne a duré pratiquement deux mois durant lesquels on a pu tester les algorithmes de navigation avec notamment l’estimation de position sur laquelle je travaillais. Le passage de la simulation à la réalité a été parfois compliqué, mais toujours enrichissante : beaucoup de problèmes à résoudre, des moments d’euphorie lorsque le drone fonctionnait.
La présentation finale de mon stage a été un moment important pour montrer les résultats à l’équipe, synthétiser tout mon travail et rassembler les données. Grâce à cette occasion, j’ai pu défendre mes résultats, recevoir des commentaires constructifs de la part de mon équipe et échanger sur les futures orientations techniques. Non seulement cela a été un défi stimulant, mais cela m’a aussi donné l’opportunité de renforcer ma confiance en mes compétences techniques.
Et sur le plan personnel ?
D’un point de vue personnel, la découverte de la culture américaine et en particulier californienne a été une grande plus-value. De la NASA aux parcs nationaux en passant par les quartiers emblématiques de Los Angeles comme Hollywood et Santa Monica, ce séjour a été intense, en semaine et durant les weekends. La culture est différente de la France, tout est démesuré : la taille de la ville, bien loin de Toulouse et du Capitole, les routes, les gratte-ciels, les plages… C’est un monde démesuré, bien loin de tout ce que l’on peut voir en Europe.
La NASA regroupe des personnes de toutes les nationalités, et travailler avec eux était très intéressant : on a pu échanger sur nos expériences de vie, comparer les modes de vie à l’européenne avec celles d’autres continents, tous regroupés autour d’une même passion qu’est la robotique et l’exploration spatiale. Finalement, je pense aussi que les souvenirs les plus marquants seront aussi ces conférences et démonstration de missions envoyées par la NASA. J’ai pu voir de mes yeux la sonde Europa Clipper qui va être envoyée vers la lune de Jupiter dans les prochaines années, le modèle de test d’Ingenuity, l’hélicoptère envoyé par la NASA sur Mars pour inspecter le sol de la planète rouge, les rovers tests Perseverance et Curiosity. Des chefs ingénieurs de grandes missions et des astronautes sont venus faire des conférences à la NASA auxquelles j’ai pu assister, c’était extraordinaire.
Que retiens-tu de cette expérience ?
L’expérience que j’ai vécue à la NASA JPL a été d’une grande valeur pour mon parcours professionnel, en me permettant de me plonger directement dans un environnement d’excellence dans le domaine de la robotique pour l’exploration spatiale. Au niveau de mon parcours professionnel, cela m’a permis de renforcer et d’approfondir mes compétences en robotique, vision par ordinateur et développement logiciel, des domaines essentiels pour les futures missions d’exploration spatiale. C’est aussi pour mon anglais que cela a été très utile ; j’ai été plongé dans un environnement anglais pendant 6 mois et cela m’a permis d’acquérir du vocabulaire technique et de participer aux réunions d’équipe pour proposer mes approches et idées. En participant à ces projets d’ingénierie de haut niveau, j’ai pu mettre en pratique les connaissances acquises à l’ISAE-SUPAERO ainsi que les compétences que j’avais acquises lors de mon stage au CNES et lors de mon semestre d’échange à l’Université de Toronto, tout en développant une expertise plus approfondie dans des technologies comme les algorithmes de perception et d’estimation pour la navigation autonome de drones. Le rôle de ce stage dans mon parcours va au-delà des compétences techniques. J’ai pu observer comment travaillent les chercheurs et ingénieurs américains sur des projets de cette envergure ; comprendre comment ils abordent les problématiques et apporter des solutions en équipe. On sent aussi qu’ils ne manquent pas de financements : les projets coûtent extrêmement cher et le nombre de projets de rovers, drones ou sondes est innombrable.
Je suis encore plus motivé à poursuivre ma carrière dans le domaine de l’exploration spatiale, en me concentrant principalement sur la robotique autonome pour l’exploration spatiale ou des océans. En effet, j’ai pu visiter les laboratoires dans lesquels les ingénieurs élaborent des sous-marins autonomes et cela m’a beaucoup intéressé. J’ai l’intention de continuer à travailler sur des technologies qui permettent d’explorer de nouveaux environnements planétaires, en partenariat avec des entreprises de renommée mondiale dans ce domaine, en particulier en Europe avec l’ESA par exemple.
La contribution de ce séjour aux activités de recherche de l’ISAE-SUPAERO est importante : les domaines d’activité de recherche de l’institut sont ancrés dans mon parcours et de mes expériences, notamment celle à la NASA. Les recherches menées là-bas sont en accord direct avec les domaines de recherche en robotique et en intelligence artificielle de l’établissement. Actuellement en dernière année du cursus ingénieur de l’école, j’ai pris des cours en accord avec ce que j’avais fait aux États-Unis : signaux, systèmes (automatique et estimation) ainsi que conception et opération des systèmes spatiaux. Les connaissances théoriques que j’ai acquises (et que je vais apprendre tout au long de l’année) pendant mon parcours ont pu être mises en relation avec les besoins concrets de l’industrie spatiale avec ce stage à la NASA et le stage au CNES au préalable. Je serais ravi d’aider des futurs étudiants à trouver un stage là-bas et leur conseiller des domaines d’ingénierie en accord avec leurs parcours à l’ISAE-SUPAERO. C’est déjà le cas avec quelques étudiants qui m’ont contacté et auxquels j’ai pu donner des conseils précieux pour leur recherche de stage. En plus de cela, j’ai acquis des compétences avancées dans les outils et les méthodes d’ingénierie à la NASA, ce qui pourra être utile aux projets de recherche et aux étudiants de l’Institut, en partageant de nouvelles approches techniques, que ce soit dans le cadre de projets de fin d’études, du PIE, de stages ou de collaborations entre laboratoires. Je pourrai également comparer mon travail avec celui fait au cours des différents projets, et tester différentes approches. Grâce à mon séjour au Jet Propulsion Laboratory, j’ai pu ainsi enrichir mon propre parcours tout en apportant une valeur ajoutée concrète aux activités de recherche de l’ISAE-SUPAERO, en favorisant le transfert de technologies et de connaissances entre l’industrie spatiale américaine et la recherche académique réalisée en France.
Et maintenant, c’est quoi la suite pour toi ?
Pour le moment, j’entame ma dernière année d’étude à l’ISAE-SUPAERO, et profite pour ces derniers mois du cadre étudiant de l’institut. À la fin de l’année, je dois réaliser un stage de fin d’études pour boucler ma formation et valider mon diplôme. J’aimerais le réaliser dans l’agence spatiale européenne, ce qui me permettrait de finaliser mes expériences et trouver un travail sereinement dans un environnement qui me correspond. C’est dans la robotique, vision par ordinateur pour l’exploration spatiale que j’aimerais évoluer par la suite. C’est un domaine vaste et prometteur, utile pour l’exploration mais également pour l’observation de la Terre.