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5 mois de stage au JPL pour Julien
Publié le
Julien a été soutenu par la Fondation pour un stage de 5 mois au Jet Propulsion Laboratory à Caltech en Californie, USA. Ce séjour lui a permis de travailler sur un nouveau concept de mission de gravimétrie spatiale appliquée à l’étude de la structure interne de petits astéroïdes.
Il nous raconte
Quelles étaient tes motivations pour ce séjour ?
Le spatial a toujours occupé une place spécifique dans ma vie. Si, petit, je rêvais d’exploration spatiale, j’ai toujours gardé un fort attrait pour toutes les sciences qui y sont associées. Ainsi, après mes années lycée, j’ai décidé de m’orienter définitivement vers ce secteur qui me passionne en réalisant deux années de classes préparatoires scientifiques dans le but d’intégrer l’école dont je rêvais : l’ISAE-SUPAERO, berceau académique du spatial et de l’aéronautique. Force de travail et d’une bonne réussite aux concours nationaux, j’ai ainsi pu rejoindre l’institut et commencer à me spécialiser dans ce secteur passionnant qu’est l’espace.
Cependant, bien qu’ayant toujours été curieux des sujets qui touchent à l’aérospatiale, cette industrie est très vaste et presque tous les corps de métiers y sont présents. Vouloir travailler dans ce secteur est déjà une bonne chose en soi, mais un univers sépare le quotidien d’un ingénieur thermicien d’un ingénieur d’affaire. Travailler pour cette industrie sonnait déjà comme une évidence pour moi, mais mes années d’école d’ingénieur m’ont surtout permis de mieux comprendre quel métier je voulais exercer dans ce secteur.
Qu’est-ce qui t’a amené à réaliser ce séjour au JPL ?
Julien Thau
À l’issue de mes deux premières années de tronc commun, j’ai décidé de réaliser une année de césure dans l’objectif d’en apprendre plus sur le métier d’ingénieur aérospatial. Plus précisément, c’est dans la mécanique spatiale que je souhaitais me faire une première expérience. En effet, durant mon troisième semestre, à la suite de ma découverte de cette discipline enseignée par Mme Lizy-Destrez, j’ai pris conscience qu’elle réunissait à la fois ma passion pour le spatial et l’intérêt que j’ai toujours eu pour la mécanique et la prédiction de trajectoires. Que ce soit au lycée ou en classe préparatoire, j’ai toujours affectionné ces problèmes physiques et je trouve fascinant le fait de pouvoir prédire avec une grande précision quel chemin va emprunter un corps en fonction de l’environnement dans lequel il se trouve et son état. Alors quand ces corps sont des planètes ou des systèmes spatiaux tels que des satellites ou des sondes d’exploration, j’ai vite compris que l’ingénieur qui calculerait ces trajectoires serait l’ingénieur que je souhaiterais être.
J’ai donc commencé mon année de césure en réalisant un premier stage de cinq mois au Centre National d’Études Spatiales (CNES) à Toulouse sur le calcul des solutions temporelles du champ de gravité terrestre.
À l’issue de ce premier stage, je suis parti six mois au Japon, dans l’Université Technologique de Kyushu (Kyutech), pour réaliser un semestre académique dans lequel j’ai pu choisir des cours uniquement centrés sur le spatial, étoffant ainsi mon bagage scientifique sur les thématiques aérospatiales.
L’expérience de cette année et demie hors cursus acquise, je retourne à l’ISAE-SUPAERO pour réaliser ma dernière année du cycle ingénieur. J’ai logiquement choisi la filière Observation de la Terre et Sciences de l’Univers ainsi que le domaine d’application conception et opérations des systèmes spatiaux parcours systèmes orbitaux en tant que spécialisation. Ces sept mois de cours et de projets viendront compléter mes connaissances académiques sur des thématiques supplémentaires et m’auront donné une vision plus globale des différents aspects de la conception d’une mission spatiale.
Parle nous de ton arrivée au JPL ?
Pour terminer cette dernière année et venir clore définitivement mon cursus ingénieur, j’ai cherché à réaliser mon stage de fin d’étude au Jet Propulsion Laboratory de la NASA (JPL). Ce laboratoire mythique a été le berceau de l’exploration spatiale lointaine, que ce soit par l’envoi de sondes comme Voyager I et II, mais également par la conception et l’opération de rovers martien comme les récents Curiosity et Perseverance. En plus d’être l’une des principales sources de mes rêveries passées, la NASA et le JPL en particulier incarnent l’excellence technique de ces missions spatiales. Des chercheurs et ingénieurs du monde entier viennent travailler ici pour contribuer à ce projet commun qu’est l’exploration spatiale. Avoir l’opportunité d’évoluer dans un milieu aussi riche culturellement et aussi exigeant techniquement viendrait ainsi mettre un parfait point d’honneur à mes différentes expériences et enseignements dans le spatial. Fort de ce choix, j’ai alors cherché un projet correspondant à mes stages et spécialisations et dans lequel je pourrai apporter mon expérience et apprendre de nouvelles compétences. J’ai contacté différents chercheurs et finis par trouver un concept de mission original et prometteur pour faire de la gravimétrie sur des astéroïdes. À la suite d’entretiens avec les chercheurs concernés, j’ai finalement été retenu pour venir travailler au JPL sur cette mission dans le cadre du Visiting Student Researcher Program de la NASA. J’ai donc travaillé sur le logiciel d’analyse mission de la NASA, MONTE (Mission analysis Operations and Navigation Toolkit Environment), pour simuler l’impact de différents paramètres de la mission sur les résultats finaux d’estimation du champ de gravité de l’astéroïde Bennu.
En quoi consistait le projet sur lequel tu as travaillé ?
La mission a pour objectif de déterminer les coefficients du champ de gravité d’un petit corps interstellaire avec une précision encore jamais atteinte pour ce type d’objet. Pour ce faire, l’idée repose sur l’envoi par un vaisseau mère de plusieurs petites sondes de la taille d’une balle de tennis à la surface du corps. En trackant les trajectoires suborbitales de ces dernières à l’aide d’un système optique, le champ de gravité, et donc la répartition de masse, du corps peut être déterminé bien plus précisément qu’avec des trajectoires orbitales plus lointaines. Connaitre avec précision le champ de gravité des astéroïdes permet de remonter à des informations très importantes sur leur composition interne et représente donc un enjeu crucial dans les missions de protection planétaire, mais fournis également des données utiles à la recherche et à la compréhension de la formation de notre système solaire.
Que retiens-tu de cette expérience ?
Durant ces six mois, j’ai eu la chance de travailler avec deux mentors bienveillants et désireux de me faire monter en compétence sur un concept de mission très innovant et stimulant. J’ai ainsi pu progresser à la fois en mécanique spatiale et en programmation Python, mais également en ingénierie système. La mission dans son ensemble faisant intervenir énormément de paramètres différents et dépendants les uns des autres, il m’a fallu développer une vision d’ensemble de la mission pour mieux estimer certains paramètres en fonction de la qualité des solutions du champ de gravité désirée. Sur le plan professionnel, en plus de ces compétences, le fait de travailler uniquement en anglais représentait tout de même un défi pour moi puisque ce fut la première fois que j’eus à évoluer professionnellement dans un environnement totalement anglophone. L’un des principaux temps fort de mon stage aura forcément été la présentation finale de mes résultats devant l’ensemble du département Robotic Mobility System Departement, présentation à laquelle ma famille a d’ailleurs pu assister en ligne. J’ai également eu la chance de voir la sonde Europa Clipper en salle blanche avant que celle-ci ne parte pour Cap Canaveral et soit lancée dernièrement. Visiter certains lieux emblématiques du JPL comme le centre de contrôle Charles Elachi d’où sont opérés les rovers martiens et d’où ont été retransmis leurs lancements auquels j’avais assisté à la télévision ont également eu une saveur particulière pour le passionné de spatial qui réside en moi depuis l’enfance.
Quel bilan personnel tires-tu de ce séjour ?
Sur le plan humain, ce séjour aura été l’occasion unique de rencontrer et d’échanger avec de nombreux ingénieurs et de former des amitiés avec des stagiaires étudiants issus de tous les pays du globe. J’ai eu l’occasion de partir visiter les nombreux parcs nationaux qui bordent la Californie et de découvrir les endroits mythiques de cette région. La grandeur des paysages américains, imperceptibles en photo, restera gravée dans ma mémoire. Culturellement, l’Amérique est bien différente de ce que j’ai pu expérimenter au Japon, mais ce voyage m’aura fait tout aussi murir. Je repars de cette région avec des souvenirs pleins la tête et des amis répartis à travers le monde à qui j’ai hâte de rendre visite un jour.
Ce projet m’aura évidemment fait progresser techniquement et m’aura beaucoup appris sur le monde de la recherche et sur la conduite d’un projet aussi complet que celui sur lequel j’ai eu la chance de travailler. Personnellement, en plus de ces apprentissages, cela aura également été un voyage riche en découvertes et en souvenirs. J’espère avoir pu représenter correctement l’excellence de la formation ingénieur de l’ISAE-SUPAERO et incarner la qualité des activités de recherche menées par les laboratoires de l’institut. Ma présence dans un centre aussi reconnu que celui du Jet Propulsion Laboratory de la NASA a peut-être également le mérite de pouvoir inspirer de futurs étudiants de l’ISAE-SUPAERO passionnés de spatial à réaliser un stage au même endroit et contribuer à leur tour au rayonnement de l’École.
Et maintenant, c’est quoi la suite pour toi ?
Mon stage fraîchement terminé, tout comme ma formation d’ingénieur, j’espère maintenant pouvoir intégrer une entreprise ou une institution en tant qu’ingénieur en mécanique spatiale ou en analyse mission. Mon objectif à court terme est de me constituer une véritable expertise en mécanique spatiale pour, à plus long terme, contribuer à mon échelle à de grands projets spatiaux, que ce soit pour l’observation de la Terre ou pour des missions d’exploration plus lointaines. Si je souhaite pour l’instant, et à terme, évoluer en France et participer à l’effort spatial français et européen, je ne me ferme pas la porte à une potentielle nouvelle expérience à l’étranger. Je ne sais pas si j’aurai un jour l’occasion de retourner là-bas, mais cette expérience sera sans nul doute valorisable dans de futurs projets.
Un mot de la fin ?
Le soutien de la Fondation m’aura permis de subvenir à mes besoins sur place et aura donc grandement contribué à ma venue. Je tiens à remercier grandement tous les donateurs de la Fondation. Grâce à leur soutien financier, j’ai pu intégrer, le temps d’un stage, l’entreprise qui m’a tant fait rêver étant plus jeune.