DON

< retour aux témoignages

18 mois à la Georgia Tech pour Eleni

Publié le

6 Sep 2022

Eleni a reçu une bourse pour formation diplômante en Mai 2020 afin de partir réaliser un Master of Science in Aerospace Engineering à la Georgia Institute of Technology pendant 18 mois. Alors qu’elle a décidé de poursuivre sa thèse à la Georgia Tech, elle nous raconte ses deux années passées là-bas !

Pourquoi avoir choisi la georgia tech ?

Mon objectif lorsque j’ai choisi d’effectuer la fin de ma scolarité à Georgia Tech était d’allier des cours dans un système éducatif différent à des projets de recherche au sein de l’Aerospace System Design Laboratory (ASDL). Lors de ma première année j’ai ainsi pu contribuer à trois projets. Le premier portait sur l’optimisation de la trajectoire des avions de ligne, le deuxième sur un réseau de vertiports pour un service d’avion-taxis, et le dernier sur une nouvelle méthode de traçabilité pour la certification des avions. Ce dernier s’est soldé par la publication d’un article à la conférence SciTech en Janvier 2022.

Cette première année m’a donc permis d’explorer une grande variété de domaines de recherche sur lesquels le laboratoire travaille. Tous mes cours reposant sur des projets, j’ai été amenée à faire de nombreuses présentations et à travailler constamment en groupe. Je trouve que cette approche est très complémentaire avec l’enseignement plus théorique de la prépa et de l’école d’ingénieur française, et cela m’a permis d’aborder sous un autre angle des enseignements que j’avais parfois déjà eu à l’ISAE-SUPAERO.

Quelles ont été tes impressions concernant les cours reçus ?

Les bases mathématiques, physiques et informatiques solides que donnent l’enseignement français ont été un véritable atout au cours de cette première année très intense. Avec les autres français, nous avons pu constater l’écart de niveau sur les fondamentaux théoriques et aussi les pratiques de codage. En revanche nous manquions souvent, en comparaison, d’expérience professionnelle. Mes capacités d’organisation, de gestion de projet et de communication ont vraiment été mises à l’épreuve du fait des nombreuses obligations à mener de front et de l’emploi du temps très libre. En effet, j’ai été surprise au début du peu d’heures de cours magistraux (moins de 10h/semaine) et de l’absence de TD mais je me suis faite au rythme et j’ai ensuite apprécié d’avoir la liberté de choisir combien de temps passer sur chaque tâche.

Tu es revenue en France effectuer ton stage avant de repartir une année ?

Oui, à la fin de cette première année j’ai décidé de réaliser un stage chez Thales AVS à Toulouse pour travailler sur un pilote automatique pour hélicoptère. J’avais envie de retrouver Toulouse après 8 mois à l’étranger et je me suis rendue compte en travaillant aux Etats-Unis que je n’avais aucune expérience du travail d’ingénieur en R&D en France et donc pas vraiment de point de comparaison. Cela m’a aussi permis de découvrir le domaine des hélicoptères. Ce stage a été un véritable tournant dans ma formation puisque par la suite, j’ai décidé de m’orienter vers la dynamique du vol des véhicules à décollage et atterrissage vertical (VTOL).

Et en deuxième année ?

Georgia Tech est justement l’une des trois universités américaines disposant d’un centre de recherche d’excellence (VLRCOE) dans ce domaine. Au cours de ma deuxième année, j’ai donc suivi des cours de conception et dynamique du vol spécifique aux hélicoptères et je me suis investie dans deux projets. Le premier avec la Federal Aviation Administration (FAA) dont le but est d’étudier différentes manœuvres pour améliorer la formation et la sécurité des pilotes concernant les récupérations de situations de vol inusuelles. Dans ce cadre, j’ai eu l’opportunité de participer au forum HeliExpo à Dallas qui rassemblait la majorité des acteurs du secteur, et c’était donc une formidable occasion de voir les dernières avancées dans le domaine. Le second projet auquel j’ai participé est une compétition étudiante visant à concevoir un VTOL électrique adapté aux personnes en situation de handicap. Ce sont ces deux projets qui m’ont décidée à rester en thèse à Georgia Tech après mon Master. 

Qu’as-tu pensé de la vie aux Etats-Unis ?

Pour ce qui est de la vie quotidienne aux Etats-Unis, je ne m’attendais pas à un choc culturel important étant donné que je pensais que le mode de vie américain était assez proche du nôtre. Et pourtant j’ai eu du mal à m’adapter à l’environnement conçu pour les voitures du Sud-Est des Etats-Unis. En dehors du campus, il n’y a pas vraiment de centre-ville piéton comme j’en avais vu dans d’autres villes américaines de la côte ouest. En France, j’ai toujours vécu en ville où tout était accessible à pied, à vélo et en transport. Mais dans cette région les villes sont très éloignées les unes des autres, et la majorité du territoire est occupée par des forêts et des marécages. Au début, je me suis donc sentie un peu piégée sans voiture, mais j’ai vraiment apprécié l’environnement cosmopolite de l’université et de mon laboratoire en particulier qui regroupe des étudiants de tous les continents et de tous les âges. Cela m’a permis de rencontrer des gens avec des parcours très différents et de me sortir un peu de l’ambiance étudiante dans laquelle j’avais baigné jusque-là.

 

Le rapport des américains à la consommation et à l’environnement est aussi quelque chose dont nous avons beaucoup discuté entre étudiants internationaux et qui nous a vraiment interpellé. En effet, mes amis américains ne comprennent pas trop notre frustration face aux lumières allumées en permanence dans tous les immeubles, aux piscines extérieures chauffées toute l’année et aux climatisations réglées à 19°C – même à Georgia Tech qui a pourtant un master sur l’environnement et les énergies renouvelables. Après un sondage rapide et probablement peu fiable d’un ami allemand outré, il semblerait même que les américains laissent l’eau couler quand ils se savonnent sous la douche. Leur habitude de se faire livrer tout et n’importe quoi en permanence plutôt que d’aller au magasin ou au restaurant est déjà bien ancrée ici alors qu’on la voit à peine arriver en France. Et on en voit donc déjà les conséquences ici, il y a beaucoup moins de restaurants et d’épiceries en centre-ville, en particulier dans les nouveaux quartiers d’Atlanta. Il y aussi évidemment le gigantisme des repas et des quantités dans les supermarchés où on peut acheter le lait frais au gallon et les œufs par palette. 

 

Sur le plan personnel, j’ai continué à pratiquer l’escalade et j’ai rejoint l’équipe universitaire lors de ma deuxième année. Cela m’a permis de côtoyer plus d’américains et de voyager grâce à ma qualification pour les championnats régionaux en Alabama et les championnats nationaux à Philadelphie. Après avoir été éliminée assez tôt à Philadelphie j’ai passé le reste du week-end, à visiter la ville, je suis allée voir la fameuse « Liberty Bell », mais aussi le musée de la Constitution et le « Hall of Independence », ce qui m’a permis de combler un peu mes lacunes concernant l’histoire des Etats-Unis. Sinon je n’ai pas vu beaucoup de différence entre les communautés de grimpeurs en France et aux Etats-Unis ce qui m’a permis de m’intégrer facilement une fois le vocabulaire anglais appris. J’ai aussi continué ma formation de pilote commercial avec le club de l’université qui offre des tarifs et des aides défiants toute concurrence. Je suis ravie d’être dans un environnement qui me permet de faire le lien entre étude théorique et vol. Cela me permet d’être consciente des contraintes réelles de maintenance, de bruit, de gestion du trafic, de capacité des pilotes par exemple, qui ont tendance à être négligées dans les cours de conception. Dans ma recherche c’est aussi très utile puisque je dois préparer des situations de vol à exécuter dans un simulateur puis étudier les décisions et réactions des pilotes. 

Et de ta remise de diplôme ?

Finalement, la remise de diplôme est sans doute le moment le plus mémorable de ces deux années. Ma famille a enfin pu me rendre visite et a assisté aux cérémonies de remise de diplôme. La première organisée par le laboratoire était très émouvante, nous avons tous fait un petit discours avec parfois des rires et parfois des larmes et surtout beaucoup de gratitude. La deuxième, la vraie, plus grandiose mais aussi plus impersonnelle où nous étions plusieurs milliers à passer sur la scène serrer la main du doyen et récupérer un diplôme, vraiment comme au cinéma. Cela a aussi été le dernier jour que j’ai passé avec tous ceux qui ne restent pas à Atlanta et qui sont maintenant aux quatre coins des Etats-Unis ou à l’international pour certain. 

LE témoignage d’Eleni Sotiropoulos-Georgiopoulos 

Diplômé de Georgia Tech

A l’issue de mon master, j’ai décidé de poursuivre en thèse dans le même laboratoire. Je prépare donc en ce moment mes examens d’entrée en thèse que je passerai en Septembre. Je ne pense pas m’installer aux Etats-Unis après ma thèse, cette expatriation m’a aussi permis de découvrir tout ce qui me plait dans le mode de vie français. J’ai maintenant une bien plus grande appréciation pour tout ce que je prenais avant pour acquis : l’accès à l’enseignement supérieur, aux soins, le pain, le fromage, un quotidien sans voiture… Et si/quand je reviendrai m’installer en France, ce sera par choix et non par défaut, je trouve ça assez formidable, d’avoir eu l’opportunité de prendre du recul par rapport au mode de vie que j’ai toujours connu et ce alors que je m’attendais juste à vivre à peu près la même vie qu’en France mais en anglais.

 

Je tiens bien évidemment à remercier la Fondation pour l’aide reçue. Je suis reconnaissante d’avoir eu cette opportunité et j’espère que cela pourra continuer.