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2 mois aux USA pour Emilie
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Emilie Robert, doctorante au DEOS/CIMI (ED-AA) et dont la thèse porte sur la science des couleurs est partie en échange de recherche aux USA au sein du Munsell Color Science Laboratory (MCSL) à Rochester. Durant 2 mois, elle a pu proposer une nouvelle expérience à l’équipe du MCSL lui permettant de compléter l’une des deux études de sa thèse dont le sujet est : Etude et modélisation d’un système de vision à haute fidélité colorimétrique.
PEUX-TU NOUS EXPLIQUER EN QUOI CONSISTENT TES TRAVAUX DE THÈSE ?
Les images de notre quotidien du 21ème siècle sont acquises et visionnées en couleur. Nos télévisions, nos téléphones et ordinateurs, tous permettent une vision indirecte – scène -> système d’acquisition -> système d’affichage -> œil – avec l’illusion d’une concordance optimale avec la vision directe – scène -> œil, que nous portons au monde qui nous entoure.
Pour certaines applications d’imagerie extrêmement exigeantes en termes de colorimétrie, telles que : l’industrie du cinéma, l’industrie du textile, la surveillance, ou bien encore l’exploration spatiale, cette illusion est régulièrement altérée par les conditions extrêmes d’acquisition rencontrées.
Mon travail de thèse vise à définir des méthodes pour la reproduction d’images numériques de très haute qualité colorimétrique. Ainsi mes travaux s’articulent autour de deux axes : la sensibilité spectrale de l’œil humain, et la chaine du traitement de l’information couleur par les capteurs d’images modernes. Deux études sont ainsi menées sur (i) la méthode de calcul de la matrice de correction des couleurs, et (ii) la prise en compte des variations individuelles de la vision des couleurs par l’humain. Les études réalisées pendant ma thèse visent à définir lequel de ces deux aspects de la chaine de la vision indirecte, largement étudiés indépendamment l’un de l’autre, est à l’origine des troubles les plus importants pour la fidélité colorimétrique.
Le DEOS-CIMI, mon laboratoire d’accueil à l’ISAE SUPAERO a souhaité au travers de cette thèse et en collaboration avec l’Institut de Recherche Biomédicale des Armées (IRBA) et la DGA Techniques Aéronautiques (DGA-TA), compléter son expertise des capteurs d’images pour applications spatiales et de défense. Ainsi l’intérêt de ces travaux et du manuscrit qui en découle est d’abord de permettre l’appropriation des fondements de la science des couleurs et du traitement d’images numériques par l’équipe du CIMI afin de constituer cette nouvelle expertise de l’imagerie couleur au laboratoire.
POURQUOI ÊTRE PARTIE
AUX ETATS-UNIS, ROCHESTER ?
Après un important travail d’étude de la littérature en début de thèse, la caractérisation spectrale des capteurs d’images développés au CIMI, et le développement en cours d’un banc de mesure des caractéristiques spectrales de l’œil humain, il s’est avéré à mi-thèse qu’échanger avec des chercheurs avertis du domaine de la science des couleurs serait d’un intérêt majeur. Ainsi, guidée par mes lectures scientifiques j’ai eu mon 1er échange avec Mark Fairchild, professeur et directeur du programme « Color Science » au sein du Munsell Color Science Laboratory (MCSL) du RIT, en avril 2020 en plein confinement. Il m’a rapidement proposée de passer quelques mois, dès lors que les conditions sanitaires le permettraient, avec les autres doctorants de son programme d’études au sein du laboratoire MCSL. Notre idée était dans un premier temps de comparer deux méthodes de mesure des caractéristiques spectrales de l’œil humain, la nôtre développée à l’ISAE SUPAERO, et la leur développée au cours de deux thèses de doctorat entre 2008 et 2016. Cependant la crise sanitaire et d’autres aléas de chaque côté ne nous permirent pas de faire cette comparaison initialement prévue. Ainsi dès mon arrivée à Rochester fin aout 2021, après que j’ai pu présenter à l’équipe mes travaux plus en détails, j’ai eu l’occasion de proposer une nouvelle expérience à réaliser pendant mon temps avec eux. Elle a permis de compléter l’une des deux études principales de ma thèse qui vise à quantifier les erreurs résiduelles après application d’une correction des couleurs sur une image. L’étude se penche en particulier sur deux types de scènes : celles qui présentent des particularités spectrales restreintes, et celles ne permettant pas l’utilisation de mires de calibration.
QUELLE A ÉTÉ TON EXPÉRIENCE AU RIT (ROCHESTER INSTITUTE OF TECHNOLOGY) ?
Mon expérience au RIT s’est concentrée sur l’optimisation de correction à appliquer pour des images particulières qui présentent des restrictions du domaine des couleurs présentent sur la scène (figure 1). Pour ce faire j’ai eu l’occasion d’utiliser la mire de calibration « Next Generation Target » (figure 2 et figure 3) récemment développée par Avian Rochester, LLC une entreprise fondée par le Prof. David Wyble du MCSL. Elle contient 130 patches colorés plutôt que les 24 patches offerts par la mire Classic® X-rite très largement utilisée dans tous les domaines pour définir la correction à appliquer à une image numérique afin de permettre un rendu des couleurs plus fidèle à la vision humaine. Ce grand nombre de patches nous a permis de calculer des corrections pour des patches correspondant uniquement à un type de teinte d’intérêt (exemple appuyé sur la figure 1 : correction calculée sur des patches rouge-orangé pour l’image de Mars, correction calculée sur des patches verts pour l’image de forêt, …) et ainsi de faire du traitement d’image teinte-spécifique pour les applications d’imagerie extrêmement exigeantes en terme de colorimétrie.
Tu as passé 2 mois là-bas, quel a été ton ressenti ?
Je suis ravie de ce séjour qui m’a énormément confortée sur le bilan des compétences acquises tout au long de la thèse. J’ai également beaucoup appris sur le langage communément utilisé dans mon domaine de recherche. S’imprégner d’un nouveau domaine débute toujours par l’apprentissage du vocabulaire qui y est relié et comme la littérature scientifique est principalement publiée en anglais, apporter une expertise en France revient à utiliser un vocabulaire parfois transformé par la traduction. Avec cet échange en fin de thèse, j’ai pu réajuster mon « langage d’étude ».
Cette mobilité s’est déroulée en toute fin de thèse, principalement pour des raisons liées au COVID-19. De fait, je commençais la rédaction de mon manuscrit en même temps que je m’adaptais à mon nouvel environnement (laboratoire, interlocuteurs quotidiens, alimentation, mode de vie). Je dois avouer que cela a représenté un challenge mais cette période s’est avérée très riche en termes d’apprentissage. Chaque discussion que j’avais au MCSL me permettait de rendre plus complète ma compréhension de chacune de mes conclusions d’études passées et actuelles. Puisque j’étais en pleine rédaction, après chaque journée de manip au laboratoire, j’avais l’occasion de faire fructifier toute la connaissance engrangée dans la journée en étayant mon manuscrit de toutes ces nouvelles idées, discussions, et perspectives.
Mon séjour au RIT, d’abord dans le but de travailler aux côtés d’experts de la science des couleurs, s’est aussi avéré être l’occasion de discuter du projet de post-doctorat pour lequel nous avons eu la joie d’obtenir un financement pas le CNES. Pendant 1 an ou 2, en collaboration CNES/ISAE/MCSL nous ferons l’étude des récentes et nombreuses images de Mars afin de comprendre quelles sont les étapes du traitement d’image actuel qui pourraient détériorer leur rendu colorimétrique. Cette détérioration sera mesurée et de nouvelles méthodes de correction seront proposées pour permettre un rendu des images martiennes telles qu’elles nous apparaitraient si nous nous trouvions effectivement sur la planète rouge. Pendant mon séjour au MSCL j’ai alors pu mettre en place la première réunion de collaboration pour la mise en place de ce projet.
Malgré un budget prévisionnel plutôt bien réfléchis j’ai eu la surprise de découvrir une loi de l’état de New-York qui s’applique à toutes les universités et requiert la souscription à un « Meal Plan » pour chaque étudiant qui loge dans une résidence officielle de l’université. Cette solution de logement s’avère être l’unique proposée pour les « visiting student » par le service international du RIT et effectivement une solution pratique dans la mesure où louer un appartement pour 2 mois est plutôt compliqué et onéreux aux USA. Seulement loger dans une telle résidence fait s’accroitre considérablement le budget alimentation. D’une prévision initiale de 800€ pour l’ensemble de la mobilité (basé sur mon budget alimentation en France), le budget a doublé du fait de la souscription au « Meal Plan » dont le montant est fixe (1539€). L’argent versé sur le « Meal Plan » dédié à l’alimentation sur le campus, n’est pas remboursable et seulement transférable sur le « Meal Plan » du semestre suivant. Cette solution probablement bien adaptée aux étudiants locaux s’est avérée plutôt dérangeante dans mon cas de doctorante en mobilité. A la fin de mon séjour, $800 restaient sur mon « Meal Plan ». Après de nombreuses discussions avec de nombreux interlocuteurs pour essayer de récupérer cette somme d’argent, lorsque j’ai compris que c’était impossible j’ai pris la décision de dépenser le reste au supermarché du campus et de donner l’ensemble des achats au « FoodShare » du RIT qui distribue de la nourriture non périssable aux étudiants dans le besoin.
AS-TU PU PROFITER DES ETATS-UNIS EN DEHORS DE TON TEMPS PASSÉ AU RIT ?
Je termine ce bilan de ma mobilité de thèse par quelques images de mes activités extra-académiques autour de Rochester, NY, USA. Il s’agissait de mon tout premier voyage aux USA et j’ai eu la merveilleuse occasion de visiter les villes de New-York et Washington DC, les chutes du Niagara, ainsi que la petite ville de Corning et son musée du verre.
Rochester était au 19ème siècle le fleuron de l’industrie de l’imagerie lorsque Georges Eastman y créa son entreprise KODAK aujourd’hui largement connue. Son incroyable travail pour la photographie est à présent rappelé dans un musée accolé à son ancienne maison dans l’Est de la ville de Rochester. Une visite incontournable pour tout doctorant ou étudiant dans le domaine des capteurs d’images.
A Washington DC, j’ai eu l’incroyable chance de visiter le musée de l’air et de l’espace et d’apprécier l’observation de pièces majeures de la conquête spatiale telles que : la navette Discovery (la vraie !!). J’ai aussi pu voir la DeLorean (la vraie également !!) de retour du futur parait-il.
LE témoignage d’Emilie Robert
Aujourd’hui docteure
Je suis rentrée de mon séjour en novembre 2021, depuis je me réjouis de la collaboration élaborée avec l’équipe du MCSL et du travail qu’il nous reste à conduire pendant mon post-doctorat au CNES.
Je remercie la fondation et ses donateurs, sans leur aide et celle de la formation doctorale de l’ISAE-SUPAERO, ce séjour qui m’a beaucoup apporté sur tous les plans, n’aurait été possible !