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2 ans à Polytechnique Montréal

Publié le

22 Nov 2022

Morgan Demenois a reçu une bourse pour formation diplômante en 2020 afin de partir étudier à Polytechnique Montréal. Parti 24 mois, il a effectué une Maitrise recherche en génie mécanique. Il est aujourd’hui encore au Canada et a commencé à travaillé pour Pratt & Whitney.

Quelles étaient tes motivations pour aller à Polytechnique Montréal ?

D’un point de vue académique et avant d’arriver à Polytechnique Montréal je souhaitais continuer ma formation d’ingénieur généraliste appliquée à l’aérospatiale commencée à l’ISAE-SUPAERO en choisissant des cours dans des domaines différents et variés. Je me suis donc inscrit en génie aérospatial et j’ai sélectionné des cours dans des domaines variés tels que l’informatique, l’électronique et la mécanique. Je souhaitais également découvrir la culture d’Amérique du Nord et avoir une expérience avec leur système éducatif très différent du système classique. J’avais hâte de développer mon autonomie et mes capacités de résolution de problèmes en travaillant sur des cours basés sur des projets et avec moins d’encadrement. Ce séjour était aussi l’occasion d’améliorer mon anglais dans une ville très bilingue comme Montréal. Enfin, je voulais découvrir un nouveau pays et profiter de cette occasion pour visiter les villes Nord-Américaines et explorer les grandes étendues et les grands parcs. Je suis très attiré par la culture Nord-Américaine depuis de nombreuses années et c’était donc une très bonne occasion d’y vivre pendant deux ans.

Merci aux donateurs !

Morgan Demenois

Je tiens à remercier la fondation pour leur aide qui m’a permis d’aborder le début de ma mobilité plus sereinement et m’a aidé à vivre cette expérience enrichissante autant personnellement que professionnellement.

D’un point de vue professionnel, j’ai appris à travailler en autonomie et en autodidacte sur mon projet de recherche. En effet, j’ai dû travailler sur de nombreux domaines que je ne connaissais pas comme l’intelligence artificielle et la machine vision. J’ai appris à conduire à bien un projet par moi-même en résolvant les divers problèmes que j’ai pu rencontrer. J’ai aussi continué à enrichir mes connaissances en mécaniques des fluides et des solides et en simulations numériques. J’ai également développé mes capacités de travail en équipe. J’ai notamment eu de nombreuses interactions avec les partenaires industriels et les autres membres du projet pour développer un montage expérimental correspondant à leurs attentes et à leurs besoins. J’ai beaucoup travaillé avec des fournisseurs, des techniciens et des ouvriers de l’école pour acheter le matériel nécessaire à mon montage et pour le fabriquer. Enfin, j’ai également appris à communiquer et transmettre mon travail et mes résultats aux partenaires industriels, aux membres du laboratoire et aux membres de la communauté scientifique avec mon mémoire, mon article, mes présentations et surtout en construisant une documentation permettant d’utiliser mon montage expérimental et mes codes. D’un point de vue personnel j’ai également beaucoup appris en travaillant avec la culture anglo-saxonne. J’ai notamment appris à être plus patient avec les autres.

Parle-nous de ton séjour d’un point de vue académique

À Polytechnique Montréal, le double diplôme commence par un trimestre d’intégration pendant lequel on peut choisir ses cours avec plus de liberté. Ce trimestre sert à choisir le génie dans lequel on va se spécialiser durant la maitrise. Durant ce trimestre, je me suis rendu compte qu’il serait impossible d’atteindre un niveau assez élevé dans tous les domaines d’ingénierie et j’ai donc décidé de me spécialiser dans mon domaine de prédilection : le génie mécanique avec de la mécanique des fluides et de la mécanique des solides. J’ai choisi des cours de génie mécanique pouvant être utiles dans l’aérospatial durant mon trimestre d’intégration.

Les cours à Polytechnique Montréal ont un volume horaire beaucoup plus faible qu’en France et demandent beaucoup plus de travail personnel. Il n’y a pas de « TD » comme en France. Les professeurs présentent le contenu du cours pendant la séance et c’est aux élèves de faire les exercices en autonomie chez eux. Il y a également beaucoup de projets à réaliser généralement en groupes et moins de gros examens écris. J’ai réalisé tous mes cours à distance à cause du Covid (depuis la France avec les 6h de décalage horaire pendant le premier semestre). La qualité des cours est en générale bonne et chaque cours approfondit plus le sujet qu’en France mais a un spectre moins large. Certains professeurs avaient enregistré de très bonnes vidéos de cours pour les cours à distance. Pendant ce trimestre d’intégration, j’ai réalisé que ces cours se chevauchent avec les cours que j’avais déjà eu à SUPAERO et en discutant avec un professeur j’ai décidé de faire une maitrise recherche plutôt qu’une maitrise professionnelle. Après le trimestre d’intégration je n’ai donc eu à prendre que trois cours (en plus des quatre cours du trimestre d’intégration) et j’ai commencé à travailler sur un projet de recherche à temps plein. Il s’agit d’un projet comparable à un « mini doctorat » qui aboutit à l’écriture d’un mémoire, éventuellement d’un article et à une présentation orale devant un jury.

J’ai personnellement travaillé sur un projet de jumeau numérique regroupant six élèves (trois doctorants et trois étudiants à la maitrise) et soutenu par deux partenaires industriels : Hydro Quebec (l’équivalent d’EDF au Québec qui exploite les installations hydro-électriques du Québec) et Maya HTT (un prestataire développant des outils numériques pour de nombreux industriels). L’objectif à long terme de ce projet est d’obtenir une méthode permettant de simuler le « jumeau numérique » de n’importe quel système à l’aide de méthodes de machine learning combinant les données de capteurs et les modèles physiques du système. Ce jumeau numérique permet d’optimiser l’opération du système réel, de planifier les maintenances et de prévoir les incidents. Pour développer ce jumeau numérique nous avons travaillé avec une expérience classique d’interaction fluide-structure : le tuyau de pompier. Il s’agit d’un simple tuyau flexible parcouru par un écoulement fluide plus ou moins rapide. Malgré son apparente simplicité il s’agit d’un système très riche qui permet d’observer des phénomènes d’interactions fluide-structure très complexes. Mon projet constituait en la conception et fabrication d’un montage expérimental permettant d’observer l’instabilité d’un tuyau de pompier avec des caméras hautes vitesses. J’ai également codé le programme traitant les images obtenues par les caméras pour extraire les données et j’ai conduit des campagnes expérimentales pour obtenir des données pour l’entrainement du jumeau numérique.

J’ai finalement travaillé sur la construction du jumeau numérique du tuyau à l’aide de réseaux de neurones, des données expérimentales et du modèle linéaire du tuyau. Mon mémoire a été nominé pour le meilleur mémoire de maitrise et j’écris actuellement un article scientifique sur certains aspects de mon projet.

J’ai beaucoup apprécié travailler sur ce projet car ça m’a permis d’avoir une première expérience en recherche académique et de comprendre le fonctionnement de la recherche. J’ai notamment appris à réaliser une revue de littérature et à écrire en suivant les règles des publications scientifiques. J’ai également pu travailler en équipe et en anglais avec les autres étudiants internationaux du laboratoire. Enfin ce projet m’a beaucoup plu car il était très varié avec une composante expérimentale, une composante de machine learning, une composante de computer vision et aussi une composante de mécanique des fluides et des solides. J’ai beaucoup appris en autodidacte dans ces différents domaines et j’ai beaucoup développé ma capacité à travailler en autonomie et à résoudre des problèmes. Enfin ce projet m’a permis d’apprendre à travailler avec la culture Canadienne et d’apprendre les différences avec notre façon de travailler en France.

Et d’un point de vue personnel ?

D’un point de vue personnel j’ai profité de mon temps libre pour voyager et visiter le plus possible les villes et la nature de l’Amérique du Nord-Est. Le Canada est un pays très grand et on ne s’en rend pas compte avant d’y être, il faut des années pour tout visiter ! J’ai aussi pris part à beaucoup d’activités sportives et culturelles proposées à Montréal. Il s’agit d’une ville très vivante et cosmopolite proposant beaucoup de festivals de musique (Jazz, Francofolie, Piknic Electronik…) de spectacles publics (cirques, feux d’artifice…), d’expositions artistiques et d’événements sportifs (matchs de Hockey, de Baseball…). C’est une ville très verte avec de nombreux parcs qui offrent beaucoup d’opportunités sportives l’été (vélo, course à pied ou sports collectifs) et l’hiver (patin sur les lacs, ski de fond…). On se sent exactement au milieu des cultures européennes et américaines. On peut y faire beaucoup de choses à pied, il y a beaucoup d’activités et la nourriture y est la meilleure d’Amérique du Nord. On y retrouve la culture américaine avec l’ambiance des matchs de Hockey au centre Bell et les grands buildings du centre-ville. Il est aussi très facile de louer une voiture pour aller explorer les parcs Canadiens et d’autres villes. Aimant beaucoup la randonnée et le backpacking j’ai beaucoup profité des parcs du Québec, d’Ontario et d’Amérique du Nord. J’ai également converti ma licence de pilote privé française afin d’obtenir ma licence Canadienne. Je me suis inscrit dans une école de pilotage Montréalaise et j’ai continué de voler autour de Montréal et même au-dessus de Montréal. Le Canada est un pays très attractif pour l’aviation légère avec moins de règles contraignantes et beaucoup de possibilités entre l’hydravions, les skis pour l’hiver et les vols dans le nord.

Et culturellement ?

Culturellement Montréal est une ville très cosmopolite et au centre de nombreuses cultures. Elle est très influencée par la culture française et anglo-saxonne. Les québécois sont très accueillants, chaleureux et gentils, cependant il est difficile de s’en faire des amis car ils ont déjà leurs cercles d’amis et ne vont pas trop vers les autres. Mon cercle d’amis était donc en grande partie composé de Français en mobilité et de quelques rares Québécois. Au travail ou à l’université la hiérarchie est bien moins visible qu’en France, les élèves tutoient les professeurs et sont beaucoup plus proches d’eux. La méthode du sandwich (faire un compliment avant et après une critique) est très répandue et il faut faire attention à être plus diplomatique et moins direct qu’en France. Les Québécois n’aiment pas la confrontation. Dans l’université les promotions étant très grandes il n’y a pas d’esprit de promotion comme en France et la plupart des étudiants restent dans leurs groupes d’amis.

Quels ont été les temps forts de ton séjour ?

L’un des points forts de ce séjour était la défense de mon projet de maitrise et le rendu final de mon mémoire. C’est le moment où toutes les briques du projet se mettent ensemble et où on peut voir le projet dans sa globalité. C’est à ce moment que j’ai pris conscience du travail accompli et des avancées réalisées pendant mon année et demie de recherche. C’est aussi à ce moment que j’ai vu tout ce qu’il restait à faire pour finaliser ce projet à très long terme.

J’ai vécu un autre point fort lors de ce séjour quand j’ai pu sortir pour la première fois dans Montréal. En effet je suis arrivé à Montréal le 3 février en pleine vague de Covid et j’ai dû rester totalement confiné dans mon appartement pendant deux semaines. Lorsque je suis sorti j’ai enfin découvert Montréal en plein hiver, sous une épaisse couche de neige et avec des températures frôlant les -30°C. Le dépaysement assuré après plusieurs mois de confinement !

Et après ?

Malgré cette bonne expérience de recherche je n’ai pas décidé de continuer avec un doctorat. En effet, le fonctionnement de la recherche académique ne me convient pas, notamment le système de publications scientifiques que je ne trouve pas sain. J’ai donc décidé d’aller travailler dans l’industrie et je souhaite rester au Canada au moins quelques années encore pour finir de visiter et de découvrir ce grand continent. L’industrie aérospatiale à Montréal est très développée avec la présence de nombreux acteurs majeurs comme Airbus, Bombardier, Pratt & Whitney, MDA et de nombreux sous-traitants. Il s’agit sans aucun doute de la capitale Canadienne de l’aérospatiale. Je vais demander mon Permis de Travail Post Diplôme au Canada me permettant de travailler pendant trois ans au Canada. Je peux demander ce permis car j’ai obtenu le diplôme de Polytechnique Montréal. J’ai accepté une offre d’ingénieur en essais et validations mécaniques de composants moteurs chez Pratt & Whitney Canada à Longueuil où j’ai commencé à travailler à la mi-octobre. J’ai terminé d’écrire mon article scientifique sur mon expérience du tuyau de pompier qui a été soumis à l’éditeur au courant du mois de novembre.

Encore un grand merci !